Rien à perdre...
Bonsoir à toutes et à tous.
J'espère que vous allez toutes et tous bien. J'aimerai vous parler de cet état. L'état de liberté totale que les mots de Bruel ont fait ressurgir à ma mémoire il y a quelques jours quand j'étais assis dans une espèce de mini-grotte dans le jardin, entouré de chants d'oiseaux et de petites bestioles grouillantes dans les herbes hautes.
la seule chose qui soit permanente est l'impermanence de toutes choses.
principe Bouddhiste
Tout à chacun a connu au cours de sa vie des périodes d'abondance et de disette. Elles alternent offrant à la vie une saveur particulière, tantôt douce comme un carré de chocolat, tantôt au goût de larmes. Elles créent un équilibre instable. Elles sont les leviers de notre évolution, à celles et ceux qui veulent bien les voir comme des leçons plus que comme des obstacles ou des réussites.
Ici, aujourd'hui, mon envie est d'orienter le débat vers les périodes de disettes. je vous laisse découvrir ou redécouvrir les paroles de Pagny sur Rafale de Vent
C'est si bon de penser qu'une rafale de vent pourrait tout emporter ?
Le pense-t-on vraiment ? Pour ma part, à maintes reprises au cours de ma courte expérience de vie, j'ai eu à affronter des manques : manque de matériels, manque d'argent, manque de reconnaissance, manque... manque manque... comme tout le monde, je pense.
Aujourd'hui, j'ai dû traverser une période quelque peu tumultueuse, dirons nous. Fidèle à mes avancées dernières, j'ai abordé cela avec une certaine philosophie mais aussi une certaine détermination. Et cette expérience récente m'a conduit à réaliser l'impermanence des choses.
Je vous pose le contexte. En sortant d'une structure sociale la semaine dernière, alors dans l'expectative d'une réponse, j'ai regardé le monde autour de l'endroit où je me trouvais. Je savais à ce moment précis n'avoir plus ni adresse, ni source de revenu durable, ni projet viable. Mes relations sociales, suite à de bien nombreux changements dans ma vie, se comptent à ce moment là sur les doigts des mains d'un manchot. En gros, les paroles de Bruel viennent à résonner dans ma tête : Rien à perdre... Et à les entendre en mon for intérieur, elles prennent une signification percutante. En effet, dès lors, qu'aurai-je peur de perdre ? Moi qui n'ai rien... Mon regard se pose alors sur le chantier voisin, j'y vois les ouvriers bosser. Dans la rue devant moi, des voitures avec des conducteurs pressés, une femme courant derrière sa poussette en regardant sa montre, le téléphone chevillé à l'oreille... Plus loin, auréolé d'un vacarme assourdissant, une bande de jeunes avancent dans ma direction, canettes métalliques en main ( certains dopés au coca, les autres à la 8.6). j'ai compris à ce moment là qu'ils étaient chez eux... dans la rue. Et contre toute attente, mon regard a, comme qui dirait, changé. J'ai regardé l'heure et elle ne m'a plus paru importante, le temps est relatif et je n'avais plus à m'en préoccupé. Par ailleurs, les quelques objets que j'avais sur moi allaient potentiellement devenir mes seuls biens pour les jours à venir... alors pourquoi me faire un sang d'encre pour une possession quelconque ? Mais encore au delà de cela... quand le temps a poursuivi sa course et que, bien malgré moi, j'ai continué de penser à ma condition du moment, seul dans la nuit naissante, j'ai appréhender pour la première fois de ma vie l'obscurité. Depuis tout petit, le noir m'effraie. Je me suis toujours forcé à y faire face par des ballades à la lune... mais là, la nuit m'est apparue comme une amie sincère et authentique. Le lendemain, pour la première fois de ma vie, je faisait une virée pédestre de 8 kilomètres à la nuit tombante, sans lumière ni gilet fluo... et sans peur.
En étant convaincu d'avoir perdu ce que j'avais, j'ai gagné quelque chose de bien plus précieux : une certaine paix de l'esprit et une certaine liberté.
J'avais passé ma vie à lutter contre des peurs, souvent liées à une croyance /illusion de possession d'ailleurs :
* je croyais posséder des objets, j'avais peur qu'on me les vole, qu'ils disparaissent ou s'usent trop vite et qu'ils viennent à me manquer.
* je croyais "posséder" des êtres ( MES amis, MES enfants, MA femme, MES parents.... plutôt que les personnes qui ont choisi d'être proches de moi, celle qui a choisi de partager ma vie...) alors, j'avais peur qu'ils me quittent, me tournent le dos, coupent les ponts ou meurent.
* je croyais posséder ma vie, mon corps ; j'avais peur que la santé me quitte, que la mort me frappe...
mais à l'heure où je vous écris, je ne me sens plus obligé de lutter, je me sens libéré de ces appréhensions.
Je détaille :
* Si je ne possède plus rien, pour quelle possession devrais-je craindre qu'elle me manque ?
* Puisque je ne "possède" ( et "n'appartient" à ) personne, quelle personne devrait créer un manque, une peur quelconque ou une sorte de dépendance en moi ?
* Si je sais désormais que rien ne dure, pas même la vie, pourquoi devrais-je avoir peur de la mort et donc du temps qui passe ? Ou des ténèbres ?
* en résumé puisque, durant cette brève expérience d'absence totale de possession, j'ai pu prendre conscience de ce principe bouddhiste dans ma réalité et ma perception propre du monde qui m'entoure, je me sens depuis libéré d'un certain nombre de peurs qui me parasitaient l'existence.
Pour votre curiosité, je vous laisse le lien d'uns ite expliquant les concepts clés du bouddhisme, où vous trouverez la présentation de l'Impermanence que je vous copie ci-dessous.
L'impermanence
Le principe d'impermanence nous montre que rien n'est immuable ou éternel, que chaque chose tend à disparaître ou à changer, c'est l'impermanence de toute chose (ou phénomène). On distingue l'impermanence grossière et subtile. Chaque phénomène n'est que transitoire et ne dure ou ne perdure pas. Il n'y a de constant que le changement. Les êtres sont constitués des cinq agrégats en perpétuel changement, c'est l'impermanence subtile. Les êtres naissent puis finissent par mourir dans la souffrance de la vieillesse, après avoir connu diverses souffrances physiques et morales tout au long de leur vie, cela fait parti de l'impermanence grossière. L'impermanence est un concept qui est valable pour toute chose (ou phénomène) de ce monde qui finit par s'user, se détériorer et disparaître. Etant donné l'interdépendance, c'est à dire que tous les phénomènes interagissent, ils ne peuvent rester identiques. Quelque soit l'échelle de temps d'observation ou la dimension d'observation, chaque chose est en constante mutation et en perpétuel changement. Rien ne dure ni ne perdure en ce monde.
L'impermanence implique la souffrance car étant donné l'impermanence de toute chose, l'attachement à toute chose de ce monde est une cause de souffrance à venir. Cette chose tendant à disparaître ou à changer. De même pour tous les désirs qui mènent inévitablement à l'insatisfaction, les choses ne pouvant pas toujours être dans l'état ou la forme qu'on le souhaiterai ou rester telles qu'on le désirerai. L'ignorance de l'impermanence est une cause de la souffrance.
Cependant, l'impermanence est une chance et non pas une fatalité. En effet, c'est parce que le changement existe que l'on peut changer! Et que l'on peut se libérer de la souffrance et devenir meilleur en suivant les enseignements du Bouddha. Comme l'explique Thich Nhat Hanh, moine zen vietnamien vivant actuellement en France, "Grâce à l'impermanence, tout est possible. La vie elle-même est possible. Si un grain de blé n'était pas impermanent, il ne pourrait se transformer en tige de blé. Et si la tige de blé n'était pas impermanente, elle ne pourrait jamais produire l'épi de blé que nous mangeons."
Pour en finir avec cet article qui, je l'espère, vous aura plu ; j'aimerai insister sur un point de détail. Il est possible que certaines ou certains de vous se disent que mon discours parait inhumain ou pour le moins dépourvu de tout sentiment. Ce qui n'est pas le cas, au contraire. L'absence de peur fait tomber les limites que nous nous mettons sans le vouloir, laissant plus de place pour le reste et pour une réalisation de vie différente et sans doute plus riche d'expériences. Je pense pertinent de revenir là-dessus dans un autre article.
Bonne soirée à toutes et tous.
Que la nuit vous soit douce.

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